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Ouvrages > LAVOISIER, Traité élémentaire de chimie, 1864 (1789).
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Lorsque nous nous livrons pour la première fois à l'étude dune science, nous 
sommes, par rapport à cette science, dans un état très-analogue à celui dans lequel 
sont les enfants, et la marche que nous avons à suivre est précisément celle que suit 
la nature dans la formation de leurs idées. De même que, dans l'enfant, l'idée est un 
effet de la sensation, que c'est la sensation qui fait naître l'idée, de même aussi, pour 
celui qui commence à se livrer à l'étude des sciences physiques, les idées ne doivent 
être qu'une conséquence, une suite immédiate d'une expérience ou d'une observation.

Qu'il me soit permis d'ajouter que celui qui entre dans la carrière des sciences est 
dans une situation moins avantageuse que l'enfant même qui acquiert ses premières 
idées ; si l'enfant, s'est trompé sur les effets salutaires ou nuisibles des objets qui 
l'environnent, la nature lui donne des moyens multipliés de se rectifier. A chaque 
instant le jugement qu'il a porté se trouve redressé par l'expérience. La privation ou la 
douleur viennent à la suite d'un jugement faux ; la jouissance et le plaisir à la suite 
d'un jugement juste. On ne tarde pas, avec de tels maîtres, à devenir conséquent, et 
on raisonne bientôt juste quand on ne peut raisonner autrement sous peine de 
privation ou de souffrance.

Il n'en est pas de même dans l'étude et dans la pratique des sciences : les faux 
jugements que nous portons n'intéressent ni notre existence ni notre bien-être ; aucun 
intérêt physique ne nous oblige de nous rectifier : l'imagination, au contraire, qui tend 
à nous porter continuellement au delà du vrai ; l'amour-propre et la confiance en nous-
mêmes, qu'il sait si bien nous inspirer, nous sollicitent à tirer des conséquences qui 
ne dérivent pas immédiatement des faits ; en sorte que nous sommes en quelque 
façon intéressés à nous séduire nous-mêmes. Il n'est donc pas étonnant que, dans 
les sciences physiques en général, on ait souvent supposé au lieu

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