émues par le spectacle de l'humanité souffrante regardent un vieillard, que sa
faiblesse condamne à l'oisiveté, comme un être à charge à la société, dont la chose
publique a intérêt de se débarrasser, et ils seront peu touchés des soins dont nous
nous occupons pour procurer une subsistance à cette classe d'infortunés. Ce n'est
point à ces âmes insensibles que nous nous adressons. Le zèle ardent qui vous
anime pour le bien de l'humanité, l'esprit de patriotisme dont vous êtes pénétrés nous
répond d'avance qu'il n'en existe point parmi vous.
Nous appellerons le plan que nous avons à vous proposer : Projet d'une caisse
d'assurance, en faveur du peuple, contre les atteintes de la misère et de la
vieillesse. Nous allons en donner le développement :
M. Mathon de la Cour, dans un ouvrage ingénieux qui sans doute est connu de la
plupart de vous (1), a établi, par des calculs de la plus grande exactitude, qu'une
somme de 100 livres, placée à 5 p. 100, et accrue, tous les ans, par le produit des
intérêts replacés de la même manière, formait :
Au bout de cent ans, un capital de : 13,136 l. 17 s. 0 d.
Au bout de deux cents ans, de : 1,725,768 l. 5 s. 6 d.
Au bout de trois cents ans, de : 226,711,589 l. 12 s. 6 d.
Au bout de quatre cents ans, de : 29,782,761,46 l. 13 s. 0 d.
Au bout de cinq cents ans, de : 3,912,516,739,074 l. 15 s. 3 d.
Cet aperçu, qui démontre ce que peut une économie longtemps soutenue, a donné Ã
M. de la Roque l'idée d'un ouvrage sérieux dans lequel il s'est occupé des moyens de
réaliser, en faveur des vieillards indigents et des veuves, une partie de l'ingénieuse
fiction imaginée par M. Mathon de la Cour.
Après avoir discuté, dans une brochure imprimée en 1785, les Tables de mortalité
publiées, pour Londres, par Sinart et Simpson ; pour Breslau, par M. Halley ; pour
Paris, par M. Dupré de Saint-Maur et par M. de Buffon ; pour les rentiers-viagers
d'Amsterdam,
(1) Voir l'extrait de cet ouvrage, à la suite de ce Mémoire. (Note de Lavoisier.)
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