MÉMOIRE
SUR LA COMBUSTION EN GÉNÉRAL (1).
Autant l’esprit de système est dangereux dans les sciences physiques, autant il est à
craindre qu’en entassant sans ordre une trop grande multiplicité d’expériences, on
n’obscurcisse la science au lieu de l’éclaircir ; qu’on n’en rende l’accès difficile à ceux
qui se présenteront pour en franchir l’entrée ; enfin qu’on n’obtienne, pour prix de
longs et pénibles travaux, que désordre et confusion. Les faits, les observations, les
expériences, sont les matériaux d’un grand édifice ; mais il faut éviter, en les
rassemblant, de former encombrement dans la science ; il faut, au contraire,
s’attacher à les classer, à distinguer ce qui appartient à chaque ordre, à chaque partie
du tout auquel ils appartiennent.
Les systèmes, en physique, considérés sous ce point de vue, ne sont plus que des
instruments propres à soulager la faiblesse de nos organes : ce sont, à proprement
parler, des méthodes d’approximation qui nous mettent sur la voie de la solution du
problème ; ce sont des hypothèses qui, successivement modifiées, corrigées et
changées à mesure qu’elles sont démenties par l’expérience, doivent nous conduire
immanquablement un jour, à force d’exclusions et d’éliminations, à la connaissance
des vraies lois de la nature.
Enhardi par ces réflexions, je hasarde de proposer aujourd’hui à l’Académie une
théorie nouvelle de la combustion ; ou plutôt, pour parler avec la réserve dont je me
suis imposé la loi, une hypothèse, à
(1) Mémoires de l’Académie des sciences, année 1777, p. 592
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